Tournée de Quêteux 2019

La gueule pâteuse de celui qui a trop rêvé.

Ce matin, je me suis réveillé chez-moi, avec la gueule pâteuse de celui qui a trop rêvé.

28 jours de voyage, 2500 km en auto-stop, 30 heures de conte. Voilà qui ne contient pas du tout l’aventure que je viens de vivre. Ce serait de rendre matériel ce qui ne l’était pas.

Le 1er mai, je tournais le dos à ma maison pour me diriger vers celle de l’autre. Des gens à travers la province m’invitaient à raconter des histoires dans leur salon, en échange d’un petit quelque chose à manger et une place où poser mon sommeil, pour recharger mes histoires. À la manière des Quêteux traditionnels, une histoire que j’aime dépoussiérer. Notre histoire. Pour qu’elle n’appartienne plus uniquement au passé.

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Posted by Patrick Dubois conteur on Friday, April 12, 2019

Prétexte pour un tas de choses. Voyager mon Québec, pour transformer des inconnus en amis, verser de l’improbable sur le quotidien et pour donner mon temps au conte, lui qui m’offre une vie de rêves.

Chaque journée démarrait en quittant un nouveau « chez-moi » et aurait pu se traduire en une route de 100 kilomètres à parcourir, jusqu’au prochain « Bonjour, fais comme chez-toi ». Ceci dit, mes journées n’ont jamais ressemblé à des distances à parcourir. Elles étaient faites de rencontres, de leurs histoires.

– Salut, moi c’est Pat, qu’est-ce que tu fais dans la vie?
– Je travaille dans tel domaine depuis tant d’années.
-T’aimes ça?

Et hop, voilà que disparaît la distance. Celle de la route. Celle entre deux inconnus qui soudain se parlent réellement.

Puis j’arrivais à ma prochaine destination, mon hôte. Mes sens se gavaient d’informations. Tiens, leur bibliothèque est garnie de ce genre de livres; sur cette commode, des souvenirs d’un voyage en Mongolie; sur la table du salon, un casse-tête 5000 morceaux; au mur, les photos d’un vieux chien qui n’est pas venu me trouver lorsque je suis entré chez-lui. Et eux aussi, m’observaient. Si le voyage, c’est s’offrir du spontané, de l’inconnu, des rencontres, et bien je suis heureux de dire que je leur en offrait un à domicile. Ils cherchaient mes histoires. Est-ce que j’ai eu de la misère sur le pouce aujourd’hui? de quoi a l’air le quotidien de celui qui ose dormir chez des inconnus pendant un mois? est-ce que j’ai une maison ou seulement un sac à dos? comment j’arrive à gagner ma vie alors que j’offre gratuitement mon gagne-pain? Tout!

Puis le conte. Des salons, remplis d’oreilles qui ne savaient dans quelle direction regarder. Avaient-ils seulement déjà assisté à une veillée de conte? J’approchais doucement, puis j’ouvrais mon sac, laissant s’échapper un flot ininterrompu de merveilleux, de pense à ça, d’histoire du gars qui… À ce moment, ce n’était plus moi qui était chez eux, mais eux qui étaient chez moi.

Puis le sac se refermait, toute bonne chose a une fin. Il faut toujours un moment aux gens avant de réaliser que c’est terminé. Pendant une fraction de seconde, ils regardent autour d’eux et cherchent à se situer, comme celui qui a fermé l’œil un instant dans le métro. La gueule pâteuse de celui qui a trop rêvé, les sens engourdis. De tous les silences desquels peut jouer un public, celui-là est mon favori. Il appartient au conte. Dans cette demi-seconde de silence, on sait que la magie a eu lieu. Que le sacré existe encore dans ce monde qui aimerait prétendre le contraire.

De tous les temps, l’homme a eu besoin de se raconter, de s’écouter. De cette action où, par l’usage d’ondes sonores, un souvenir est transféré d’une mémoire à une autre. Wi-fi millénaire. Le conte a la particularité de s’adresser au cœur. Tout le monde met son rationnel de côté, comme on déposait nos guns au bar en arrivant dans un saloon. Soudain, l’improbable devient acceptable; le merveilleux fait légion; l’exagéré devient un minimum requis. Puis il en redemande, l’enfant en nous.

Plus que jamais, nos maisons sont des barricades contre l’extérieur où les seuls fenêtres par lesquelles on regarde sont numériques. Plus que jamais, les Quêteux sont pertinents, déposant ça et là leur sac de voyages livrés à domicile.

Merci de m’avoir aidé à le faire, et qui sait, de m’aider à le refaire demain! En m’accueillant, en m’embarquant, en me suivant. Pour moi, le printemps s’achève et l’été m’appelle. Je troc la route contre ma yourte. Je me prépare à recevoir autour de mon feu ceux qui veulent bien entendre mes histoires. Mais mon chez-moi n’est qu’une pause au chez-nous. À bientôt.

Pour ceux qui ont aimé goûter au conte, explorez ceci: http://conte.quebec/

Pour ceux qui voudraient suivre mes prochaines aventures: https://www.facebook.com/patrickduboisconteur/

Pour une suggestion d’arrêt pour vos vacances:

Cet été, tirez-vous une bûche à La Petite Grève!Du 15 juin au 31 août au pied du phare de Carleton-sur-Mer, tous les…

Posted by La Petite Grève on Monday, May 27, 2019

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